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"les sources religieuses et spirituelles de la Franc Maçonnerie" avec Mr Mahieu de Toulouse qui a eu lieu au café « Le Darolles » à Auch  le 3 Avril  2010    

Le sens de l’engagement maçonnique

par Jean-Pierre MAYEUX Grand Maître de la GLNF

 

 

Les grandes préoccupations humaines tournent et on toujours tourné autour de quelques pôles parfaitement identifiables l'origine du monde, l'origine de l'homme, l'origine des éléments, la destinée, la mort, Dieu et les dieux, l'Etre Suprême ou le Grand Horloger, les grandes lois de l'Univers. Et depuis les temps immémoriaux, l'humanité a construit des éléments de réponses inévitables à ses préoccupations qui finalement posent la question fondamentale.

Quel est le sens de la vie de nos vies au sein de la manifestation matérielle ?

La Franc-Maçonnerie, n'échappe pas à cette loi historique, notre adhésion qui résulte d'une réflexion consciente, constitue une des réponses à un besoin, ou plutôt un manque, dont les contours et le contenu nous échappent. Mais l'un des fondements de notre démarche portée par le Rite pourtant laïque, s'appuie sur la foi en le Grand Architecte de l'Univers et le travail qui, parce qu'il est lié à celui de la Perfection Originelle, fonde le statut de l'homme libre. La Franc-Maçonnerie, équilibrée par deux puissantes racines que sont l'hermétisme et le pythagorisme, a pour ambition de démontrer que l'action en vue d'une société meilleure est possible. L'ancien et le premier manuscrit maçonnique « le Cooke » vers 1400, évoque l'hypothèse selon laquelle toute la sagesse antédiluvienne était écrite sur deux grandes colonnes. Après le déluge, l'une d'elle fut découverte par Pythagore et l'autre par le philosophe Hermès Trismégiste, qui se vouèrent à enseigner les textes qui y étaient gravés. Le manuscrit concorde parfaitement avec ce dont témoigne une légende égyptienne déjà relatée par Manéthon que « le Cooke » rattache à Hermès Trismégiste. « Le Cooke » nous apprend aussi qu'Abraham enseigna l'art de la géométrie à son élève Euclide, qui confia ses connaissances sacrées aux égyptiens et que l'Art royal parvint en France par les maçons opératifs instruits des secrets du métier par le roi Salomon.

Nous trouvons la première trace tangible des rituels maçonniques sur le mur sud d'une petite église du XV°siècle, dans le Mid-Lothain, aujourd'hui connue sous le nom de chapelle de Roselyn. Elle fut construite entre 1441 et 1486 par Lord William Saint- Clair, grand chancelier et grand amiral d'Ecosse. Il était le deuxième homme le plus puissant du royaume et semble même avoir menacé la puissance des rois Stuarts.

La nouvelle chapelle que William Saint- Clair construisit était un projet formidablement ambitieux. Les moindres surfaces du bâtiment, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, devaient être sculptées avec un foisonnement de détails. Aucune des étranges sculptures de l'édifice n'était là par hasard ou du fait de lubies de maçons fantasques. La représentation d'un renard- revêtu d'une robe d'ecclésiastique s'adressant en chaire à une assemblée de poulets en dit long sur l'opinion que Lord William avait des prêtres de l'église. Mais c'est un petit bas-relief de l'angle extérieur sud-est qui fournit le premier élément de preuve documentée de ce qui aujourd'hui est connu comme la Franc-Maçonnerie spéculative.

La scène, nous montre un homme s'agenouillant en adoptant une très étrange posture : ses pieds forment une équerre, dans la main gauche, il tient une Bible, ses yeux sont bandés et il a une corde de pendu autour du cou. A côté de lui se tient un homme barbu, en robe de Chevalier Templier qui tient la corde.. Cette étrange paire se tient entre deux piliers. Hormis l'habillement médiéval de l'homme agenouillé, cette scène aurait pu être la représentation d'une cérémonie maçonnique moderne de réception du premier degré. « A la fin du XVI°siècle, remarque David Stevenson dans son livre sur « les origines de la Franc- Maçonnerie », l'Ordre maçonnique était à la veille d'un développement remarquable qui allait le transformer...  Un homme remarqua que certains aspects de l'héritage traditionnel du métier de la maçonnerie reliaient toute une série de thème dans la pensée et la culture de l'époque, et il s'instaura à les introduire dans l'Ordre. » Cet homme c'est William Shaw, le Maître des Travaux du roi Jacques VI et de la reine Anne. Et ce fut en 1590 que William Shaw commença à s'intéresser aux free maçons, c'est-à-dire des ouvriers libérés de leur apprentissage qui avaient acheté leur liberté et avaient cessé d'être soumis à un maître et à leur organisation professionnelle décrite par les Old Charges sur les îles britanniques et par des Chartes tels les Statuts de Ratisbonne de 1459.

Shaw, put envisager de réorganiser le métier de maçon sous le contrôle d'un certain nombre de surveillants généraux. Cette maçonnerie nouvelle qui impliquait les plus hauts rangs de la société devenait une maçonnerie spéculative. Shaw, huit ans plus tard sous sceau royal, devint le Surveillant général des métiers d'Ecosse qui réunit en 1598 un certain nombre de maîtres maçons le jour de la Saint-Jean à Edimbourg. Ainsi, en tant que Maître des travaux du roi, Shaw intervenait dans tous les chantiers de construction de l'Etat. Il voulait faire de la Franc-Maçonnerie une institution royale, avec à sa tête, le roi, en qualité de Grand-maître, qui fut initié dans la loge de Scoon et Perth en 1601.

Nous pouvons qualifier cette période de moment historique de la Franc-Maçonnerie moderne puisqu'elle se situe dans une période de pleine mutation intellectuelle qui voit émerger une métaphysique moderne de la recherche de la connaissance de l'origine. L'Europe chrétienne est livrée à des troubles et à des guerres. Depuis l'excommunication en 1520 de Luther, du rejet de Rome par la Confession d'Augsbourg, de la publication de « l'Institution de la religion chrétienne » par Calvin de l' « Acte de Suprématie » en 1534 qui fait du roi d'Angleterre le chef de l'église anglicane et de la Contre-réforme qui aboutira au Concile de Trente et de la fameuse expérience de Galilée en 1589; l'Europe est confrontée à une profonde crise de conscience religieuse.

Ce schisme, qui se prolonge tout au long du XVII° siècle, ne concerne pas seulement l'église romaine et les églises protestantes. Il s'agit d'une forte évolution de la conception du savoir et du rapport de l'homme à Dieu et de ce qui forme le lien nécessaire entre les idéaux rationalistes, scientifiques et humanistes qui vont se développer au cours des XVII°et XVIII° siècles.

Une nouvelle attitude de questionnement concernant le fonctionnement et les oeuvres de la nature voit le jour et va donner naissance en Angleterre, à ce qui doit être considéré comme le creuset de la Franc-Maçonnerie spéculative moderne, la Royal Society inspirée de Francis Bacon qui prône la philosophie naturelle et se réfère à un plan de l'Univers exécuté par un « Ordonnateur Suprême », un « Grand Architecte ».

Mais les hommes qui fondèrent cette société ne furent pas simplement les premiers scientifiques. Nombre d' entre eux étaient francs-maçons : Robert Moray, Robert Boyle, John Wilkins et Isaac Newton. Sous l'influence de Jacques I° roi d'Ecosse d'Irlande et d'Angleterre, fils de Marie Stuart et initié Franc-Maçon, qui disait avoir trop souffert entre les mains de la dogmatique église catholique et qui n'entendait pas plus favoriser les différents mouvements protestants que d'autres de d'église que lui-même, certains francs-maçons de la Royal Society cristallisèrent leur recherche intellectuelle dans des courants de pensée hermétistes et alchimiques notamment qui nourrissaient non seulement la plus vive hostilité à l'adresse des jésuites et du pape, mais également à l'adresse de l'orthodoxie protestante. C'est ainsi que, sous l'influence respective de Robert Moray Franc-Maçon et Président de la Royal Society, de Elias Ashmole Rose-croix initié en 1646 dans la loge anglaise « l'Acception » que la maçonnerie spéculative vit le jour. En 1723 paraissent les « Constitutions » du pasteur Anderson contenant les devoirs, les règlements de « cette très ancienne et vénérable fraternité ». La Franc-Maçonnerie moderne spéculative allait donner lieu à un développement insoupçonné et à une interrogation à son endroit les plus fantaisistes et romanesques.

Elle demeure ce qu'elle a toujours été, mystérieuse à tout profane. « Un Franc-Maçon, pour reprendre un librettiste du XVII° siècle, sera pour le public, toujours un vrai problème qu'il ne saurait résoudre à fond qu'en devenant Franc-Maçon », c'est-à-dire à vivre cette lente transformation généré par un travail laborieux sur nous même.

Ce principe repose sur l'initiation, sur l'hypothèse qu'un travail constant et régulier de réflexion individuelle et collective de chaque Franc-Maçon, au moyen de symboles, pendant des tenues, peut conduire à une évolution intellectuelle, morale et spirituelle positive de chacun. L'initiation, ne consiste pas en un savoir à acquérir, un catéchisme à apprendre ou une doctrine à assimiler, mais en une expérience personnelle à élaborer, puis enrichir grâce au travail initiatique pour évoluer vers plus de conscience et de connaissance. C'est pourquoi, elle ne peut être considérée comme une école où l'on viendrait apprendre une forme de pensée unique se traduisant en mots d'ordre référés à une idéologie ou une religion. Elle peut être en revanche considérée comme une école à penser en liberté, où l'intelligence de chacun vient se confronter à celle de tous, en respectant les principes de régulation de la prise de parole permettant de préserver l'ordre nécessaire à un échange libre et créatif mais aussi ordonné et organisé.

Cette quête constitue un chemin individuel qui permet donc d'établir le sens qu'il souhaite donner à sa vie, à son humanité. Cette construction personnelle par le sens, se manifeste à travers les réponses que nous devenons capables de formuler aux interrogations métaphysiques consubstantielles au phénomène humain: « Qui suis­-je ? Quelle représentation de l'origine puis-je concevoir ? Que va-t-il arriver après ma mort ? »

Cette construction de sa spiritualité, le Franc-Maçon la construit dans le devenir. « L'homme, dit Erasme, ne naît pas homme, il le devient » et cela s'exprime par la pratique de nos rituels et de la méthode symbolique. Le symbole est un fragment de vérité qui renvoie à la vérité et nous invite à percevoir constamment des sensibilités évolutives, qui nous aident à construire précisément notre spiritualité ; Il n'en est pas moins important de travailler à la Gloire Du Grand Architecte de l'Univers, garant d'une spiritualité ouverte : parce qu'il est porteur d'un plan, il symbolise le sens, la non-absurdité de l'aventure humaine. Il est l'architecte, le créateur. La devise du rite auquel je travaille, le R.E.A.A est « ordo ab chao », que l'on peut traduire par « du chaos vers l'ordre » ou « l'ordre tiré du chaos ». Elle nous invite à reconnaître l'existence d'un principe d'Ordre de l'oeuvre de l'Univers, dans un monde manifesté.

Le Volume de la Loi Sacré qui est la Bible représente à la fois :

-          une part de l'héritage culturel sur lequel s'est construite la Franc-Maçonnerie

-          La Loi Morale à laquelle tous les Maçons veulent se référer en s'engageant à respecter une règle qui dépasse le seul cadre de la stipulation légale.

Ne la voyons pas comme le livre fermé d'une religion, d'ailleurs, n'est-il point ouvert lors de l'ouverture de nos travaux ?

N'y lisons point non plus le texte d'une loi, mais seulement un témoignage de lumière et d'amour.

Elle atteste la primauté du spirituel sur le matériel.

Elle rappelle aussi que notre Ordre, la GLNF, ne pouvait être qu'initiatique et traditionnel, opératif par la présence des outil déposés sur elle dès l'ouverture de nos travaux, spirituel par les messages qu'il suggère aux impétrants.

Vous le voyez, la Franc-Maçonnerie, n'impose ni même ne propose à l'initié aucune doctrine, aucun dogme, aucune idéologie. Elle s'appuie cependant sur un postulat, celui du sens, de la non-absurdité du monde et de la vie. Là où la religion apporte des réponses, la spiritualité maçonnique, ouverte, dépourvue de dogme, que l'on peut appeler laïque, incite à se poser des questions ou plutôt la question. L'interrogation n'est pas dans l'irrationnel. Le point de départ d'un itinéraire spirituel authentique, pour une humanité qui est de plus en plus inquiète de ses repères et de ses valeurs, se situe nécessairement dans la raison.

Nous l'acceptons d'autant plus facilement qu'un double héritage nous y prépare. Celui des bâtisseurs où on ne construit pas sans un plan établi selon la raison ; celui de la maçonnerie spéculative dont on connaît les relations étroites avec la philosophie des lumières. Il s'agit de lutter contre l'ignorance, le fanatisme et la superstition. Mais il faut aller plus loin, car la raison resterait un vain mot dans un monde qui ne serait pas habité par le sens. La Franc-Maçonnerie, qui ne propose aucun dogme, s'appuie sur le postulat de la quête du sens, du sens premier, du sens géométrique qui ne peut être démontré et vérifié seulement par ses conséquences ou ce qui revient au même, par les conséquences qui n'auraient pu se produire s'il n'existait pas. Personne, n'a jamais prouvé et il est à craindre que personne ne prouve jamais que le monde a un sens. Mais si nous ne le croyons pas, alors toute démarche devient vaine, à commencer par la démarche maçonnique. Cette démarche, à laquelle nous convie la Franc-Maçonnerie est dans l'arrachement à soi-même, cette sculpture de soi. Nous retrouvons là le message de jean qui dessine une réponse possible à la question posée.

L'homme a changé et la spiritualité du XXI° siècle exigera sans doute un double effort.

Entre un matérialisme réducteur et un dogmatisme oppressant, entre la tentation du non-sens et celle du sens imposé, une autre solution se distingue. Entre l'expression du poète « celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas » et qui ont parfois une façon bien péremptoire d'y croire ou de ne pas y croire- car l'athéisme a aussi ses intégristes- entre ces positions extrêmes se situe tout un monde dont il serait irréaliste d'ignorer qu'il réunit une partie majeure de nos contemporains : le monde de ceux qui doutent, de ceux qui cherchent, de ceux qui espèrent.

Un monde que l'on pourrait intituler les limbes, séjours des esprits en attente.

 

Résumé de l’intervention rédigé Jean-Marc HOPPELER

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